mercredi 26 octobre 2016


La situation de l’Eglise catholique en Haïti : témoignage d’un séminariste



En cette nouvelle année, le Grand Séminaire de Strasbourg a la joie d’accueillir dans la communauté cinq nouveaux séminaristes, parmi lesquels deux jeunes hommes haïtiens. Ils appartiennent à la Société des Prêtres Missionnaires de Saint Jacques (œuvrant en France, au Brésil et à Haïti).

Je suis Nahum Guénaël Poulard.  Avec mon confrère Amoce Fraime Louis nous avons intégré cette année le Grand Séminaire Sainte Marie Majeure de Strasbourg, après déjà deux années de formation à Haïti même.  Nous sommes les deux premiers séminaristes haïtiens de la société des Prêtres de Saint-Jacques, pour ne pas dire les deux premiers haïtiens, à faire partie du Grand Séminaire de Strasbourg depuis sa fondation. Nous sommes très heureux de vivre cette nouvelle aventure de notre formation. Nous allons de commencement en commencement. Pour dire que la mission ne fait que commencer.



Votre pays a été secoué par le passage du cyclone Matthew qui a fait beaucoup de dégâts. Pouvez-vous nous dire un mot là-dessus ? Et quelle est la réaction de l’Eglise catholique à Haïti ?

Je voudrais d’abord saluer la mémoire de nos compatriotes victimes de l’ouragan. Le cyclone a fait de nombreux dégâts, plus particulièrement dans la partie sud du pays. Il a emporté les biens des paysans avec le débordement des rivières. Des routes sont coupées. Des ponts sont tombés. Les gens sont déplacés. La communication entre certaines régions est devenue de plus en plus difficile. Mais surtout de nombreuses personnes ont perdu la vie. Aujourd’hui, les gens, dans la partie sud du pays, ont besoin de tout (nourriture, santé, accompagnement spirituel, une présence réconfortante pour faire face au traumatisme, etc.). Les églises n’ont pas été épargnées. Les  toitures sont ruinées. Les gens du sud sont aujourd’hui dans une situation extrêmement difficile. Ils vivent dans des abris provisoires comme des écoles, des églises...

Que fait l’Eglise ? (soupir) Elle essaie de tenir en vie les survivants, car certains sont pratiquement désespérés. Il faut les nourrir. L’Eglise manifeste sa proximité avec les gens  dans un processus de relèvement et de résurrection de manière très lente, mais efficace. Elle reste fidèle à sa mission. C’est sa vocation d’être sel et lumière du monde. Elle met en œuvre sa doctrine sociale en venant en aide aux nécessiteux. Elle qui est experte en humanité, est toujours présente au milieu de son peuple, en référence à la marche du peuple juif sortant de l’Egypte pour la terre promise sous la présence de Dieu. Je voudrais d’ailleurs féliciter le grand travail de la Société des Prêtres Missionnaires de Saint Jacques pour l’assistance qu’ils prodiguent aux victimes.

Avez-vous les nouvelles de vos parents ?

Nos familles vont bien, même si elles ont presque tout perdu. C’est une école du dépouillement, mais aussi une école de l’espérance. Nous vivons les choses en restant ouvert au Dieu amour. Il nous aide à vivre dans la fragilité de notre immanence. De là vient l’élan de solidarité qui prend corps dans les relations interpersonnelles. La joie n’est pas tout à fait enterrée. Il y a là un message de confiance, vécue et voulue.

Bon courage à mon peuple. « Ochan pour tout Ayisyen » (salutations)

                                                                  Propos recueillis par Paterne (Séminariste de Strasbourg)